251008 - MUS QZD - SAINT-SAËNS - L'ANCÊTRE - SOLISTES, ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE MONTE-CARLO, KAZUKI YAMADA
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251008 - MUS QZD - SAINT-SAËNS - L'ANCÊTRE - SOLISTES, ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE MONTE-CARLO, KAZUKI YAMADA
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CAMILLE SAINT-SAËNS 1835-1921 « L'Ancêtre » Jennifer Holloway (Nunciata), Gaëlle Arquez (Vanina), Hélène Carpentier (Margarita), Julien Henric (Tébaldo), Mochael Arivony (Raphaël), Matthieu Léocroart (Bursica), Chœur philharmo-nique de Tokyo, Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, Kazuki Yamada. Bru Zane (2CD). SAINT-SAËNS - L'Ancêtre
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TECHNIQUE : 3,5/5 Enregistré à l'auditorium Rainier III de Monaco en octobre 2024 par Jiri Heger, Ignace Hauville et Louis Vitteaud. Un orchestre précis, doté d'une belle cohésion et d'une définition claire, forme un riche écrin au centre duquel les solistes trouvent toute leur place. Projetés au premier plan, ceux-ci se détachent nettement, portés par une réverbération généreuse. Ce halo, en décalage avec une phalange plus sobrement réverbéré, crée une dissociation acoustique : voix et instruments semblent ainsi évoluer dans deux espaces distincts. Le chœur, à l'arrière plan, manque légèrement d'ampleur.
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L'événement
Balle tragique
D'une histoire de vendetta corse, Saint-Saëns tire un ouvrage riche en effets dramatiques, ressuscité par un plateau superlatif et des forces nippo-monégasques chauffées à blanc.
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C'est pour l'Opéra de Monte-Carlo que Saint-Saëns compose en 1906 L'Ancêtre, une vendetta corse en trois actes. Nunciata, la doyenne du clan Fabiani, exclut de faire la paix avec le jeune Tébaldo Piétra Néra malgré les efforts de l'ermite Raphaël. Un nouveau meurtre ensanglante vite les deux familles, Léandri Fabiani ayant été tué par Tébaldo. Nunciata arme Vanina pour qu'elle venge son frère, mais lorsqu'elle aperçoit Tébaldo enlaçant son amie Margarita, elle s'y refuse et court au devant des amoureux. Furieuse, Nunciata, quasi aveugle, s'empare du fusil et tire : c'est Vanina qui tombe. Dès l'ouverture, Saint-Saêns oppose le tempérament brutal du rôle-titre, figuré par un motif volontaire tout en affirmations anguleuses (que Poulenc semble avoir décalqué dans son Concerto pour orgue), au paysage idyllique de l'île de beauté, tout bruissant d'oiseaux. Si un passage célèbre le travail des abeilles, c'est aussi parce que l'histoire se déroule sous l'Empire, et des lambeaux de Marseillaise colorent le récit du soldat Tébaldo. Tourbillon de haine L'action file. À l'acte I, les supplications que chacun formule auprès de Nunciata s'agrègent en un crescendo auquel répond d'abord le silence de l'ancêtre, avant un lapidaire « non ». Le climat d'attente le cède alors à un tourbillonnant et sombre decrescendo, et tous se séparent au cri affolé de « c'est la guerre. » Fauré, présent pour la création, applaudit « la vérité, la fermeté, la netteté dans le dessin des personnages comme dans l'exposé et le développement des situations. » Nous nous inclinons avec lui devant une « sobriété et une certitude d'effets toujours surprenantes » : le vieux maître cherche partout à étonner son monde. Une phrase du requiem (copiant celui de son ancien disciple Fauré) annonce au II la mort de Léandri, Margarita entre au III sur une longue vocalise rêveuse, et cette heure et demi de drame se conclut sur une page d'orchestre à la volupté toute cinématographique. Relief et couleurs Prenant appui sur les cordes nerveuses et très disciplinées du Philharmonique de Monte-Carlo, la direction de Kazuki Yamada rend à L'Ancêtre accents, relief et couleurs, aidé par un chœur tokyoïte aux contours ne manquant ni de vigeur ni de netteté. Le plateau mérite lui aussi tous les éloges.On peut compter sur le génie théâtral de Jennifer Holloway pour traduire la dureté de cette matrone littéralement aveuglée par son désir de vengeance. Au II, la mort de son petit-fils (« Ils l'ont tué ! ») inspire une imprécation sur laquelle la haine souffle crescendo, au rythme du motif entendu dans l'Ouverture. Matthieu Léocroart prête son métal aux phrases vindicatives du serviteur Bursica, tandis que la bonté de l'ermite s'incarne dans le baryton élancé de Michael Arivony, fermement assis sur les consonnes. Au soprano dramatique d'Hélène Carpentier, campant l'orpheline Margarita, répond le ténor lumineux de Julien Henric, jeune officier dont l'héroïsme et la générosité semblent, au disque, un rien bridé. Chapeau, enfin, à Gaëlle Arquez, dont le mezzo sombre et dense épouse les tourments de Vanina, victime résignée. Symbole d'une France vampirisée par l'ogre napoléonien ?
François Laurent
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