250505 - CIN FIL - « SORRY WE MISSED YOU » - DE KEAN LOACH

 





250505 - CIN FIL - « SORRY WE MISSED YOU » - DE KEAN LOACH






« SORRY WE MISSED YOU »


de KEAN LOACH


2019 – Royaume-Uni, France, Belgique


avec Kris Hitchen, Debbie Honeywood, Rhys Stone, Katie Proctor, Ross Brewster, Charlie Richmond


1 h 38









Dans le sillage d'un livreur de commandes en apnée et de sa famille, un réquisitoire contre l'exploitation ubérisée, où la lucidité rageuse de Ken Loach le dispute à sa tendresse pour ses héros.


Afin d'échapper à la précarité de ses petits boulots dans le bâtiment, Ricky, un prolo de Newcastle à la tête près du bonnet, se fait livreur "indépendant" pour un sous-traitant d'Amazon, Apple et consorts, sur le conseil d'un copain qui y travaille. Plutôt que de louer un véhicule à l'entreprise pour un tarif prohibitif, le même copain l'incite à en acheter un neuf à crédit. Ricky, qui table sur des bénéfices rapides, convainc sa femme, Abby, aide à domicile chez des personnes âgées et rémunérée elle aussi à la tâche, de vendre sa voiture. Le couple, dont les économies ont été englouties lors de la crise de 2008, plonge alors dans une spirale cauchemardesque avec ses deux enfants, Seb, lycéen en pleine rébellion, et la cadette Liza Jane, collégienne hypersensible en qui infusent les angoisses parentales.


À l'os


Aussi frontale que l'exploitation ubérisée qu'elle met en lumière, tendue comme la tournée de quatorze heures qui ne laisse même pas à Ricky le temps de pisser, cette chronique sociale à l'os revigore plus qu'elle n'accable. Ken Loach et son scénariste attitré, Paul Laverty, dosent avec maestria la rage, la dérision, l'amour et la révolte, qu'ils assaisonnent de gros mots bien sentis. Véritable crescendo émotionnel, Sorry We Missed You ("Désolés de vous avoir manqué", formule imposée aux livreurs pour avertir le client absent qu'ils repasseront) repose aussi sur l'excellence collective de ses interprètes, avec en tête le craquant (à tous les sens du terme) et inoubliable quatuor familial. En contrepoint, Ross Brewster campe un boss abusif très convaincant, aussi aliéné au fond que ceux qu'il brutalise au nom des nécessités économiques. "Tu veux un jour de congé ? C'est 100 livres pièce." Dans la longue filmographie du vieux maître (89 ans aux cerises), ce gros plan sur la servitude des "premiers de corvée", que nos sociétés de service s'arrangent si bien pour ne pas voir, s'avère plus que jamais d'actualité.




Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

250607 - CIN FIL - ARTE - « POURQUOI PAS » - DE COLINE SERREAU

250213 - CIN FIL -ARTE - « UN JOUR J'AURAI UNE ÎLE » - DE VINCENT WEBER

250715 - MUS QZD - LUKAS GENUSIAS - HALLELUJAH JUNCTION - ŒUVRES DE GERSCHWIN, STAVINSKY, COPLAND, RZEWSKI, MCPHEE ET ADAMS